Absence d’effet dévolutif de l’appel en l’absence de mention des chefs de jugements critiqués

La deuxième chambre civile de la Cour de Cassation a rendu un arrêt en date du 30 Janvier 2020 selon lequel il n’y a pas d’ effet dévolutif de l’appel en l’absence de mention des chefs de jugements critiqués dans la déclaration d’appel.

Ccass, 2ème civ, 30 janvier 2020 (18-22.528)

La décret du 6 Mai 2017 a modifié la procédure d’appel. Depuis, l’appel ne peut plus être total, il faut préciser les chefs de jugement que l’on entend critiquer (sauf si l’appel tend à l’annulation ou si l’objet du litige est indivisible).

L’article 901 du Code de Procédure civile dispose que la déclaration d’appel doit contenir à peine de nullité: « 4° les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible « .

Aussi, le défaut de mention de chefs de jugements critiqués constitue un vice de forme, la nullité ne peut donc être encourue qu’à charge pour l’adversaire de prouver que cette irrégularité lui cause un grief.

L’article 562 du Code de Procédure civile dispose que : « l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent  » en précisant que « la dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible« .

En l’espèce, deux appels avaient été formés en mentionnant appel total sans précisions des chefs de jugements critiqués.

En l’absence de grief, l’intimé n’a pas souhaité se positionner sur le terrain de la nullité mais plutôt sur l’absence d’effet dévolutif de l’appel conformément à l’article 562.

L’appelant avait tenté de régulariser cette erreur dans ses conclusions, mais la Cour d’appel rappelle que seul l’acte d’appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement, en précisant que seule une nouvelle déclaration d’appel peut venir couvrir l’irrégularité (et non des conclusions).

La Cour de cassation approuve l’arrêt rendu :

4. En vertu de l’article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s’opérant pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

5. En outre, seul l’acte d’appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.

6. Il en résulte que lorsque la déclaration d’appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l’effet dévolutif n’opère pas.

10. Or, la cour d’appel a constaté que les déclarations d’appel se bornaient à mentionner en objet que l’appel était « total » et n’avaient pas été rectifiées par une nouvelle déclaration d’appel. Elle a donc retenu à bon droit, et sans méconnaître les dispositions de l’article 6 §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, que cette mention ne pouvait être regardée comme emportant la critique de l’intégralité des chefs du jugement ni être régularisée par des conclusions au fond prises dans le délai requis énonçant les chefs critiqués du jugement.

Toutefois, la Cour de Cassation reproche à la Cour d’appel d’avoir statué sur le fond tout en décidant n’être saisie d’aucune demande.

En effet, elle ne pouvait donc confirmer la décision dont appel.

Distinction entre la déclaration d’appel et son annexe contenant les chefs de jugements critiqués

La deuxième chambre civile de la Cour de Cassation a rendu un arrêt le 5 Décembre 2019 (n°18-17.867) relatif au problème suivant:

Conformément à l’article 905-1 du Code de procédure civile, suite à la réception de l’avis de fixation l’appelant a voulu faire signifier sa déclaration d’appel à l’intimé défaillant, ce qu’il a fait.

Toutefois, il avait omis d’y joindre le document annexe contenant les chefs de jugements critiqués.

Malgré cet oubli la Cour de Cassation refuse de déclarer caduque la déclaration d’appelant en opérant une distinction:

« Attendu que, pour déclarer caduque la déclaration d’appel, l’arrêt retient qu’à défaut de l’annexe contenant les chefs de la décision critiqués, que doit obligatoirement comporter une déclaration d’appel, l’acte du 15 décembre 2017 n’emporte pas signification de la déclaration d’appel ;
Qu’en statuant ainsi, alors que la déclaration d’appel, dont la nullité n’avait pas été prononcée, avait été signifiée dans le délai requis par la loi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 22 mars 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Dijon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Lyon » 

L’annexe à la déclaration d’appel n’est donc pas la déclaration d’appel selon la Cour de Cassation.